Le 7 mars 2018, veille de la Journée internationale des droits des Femmes, des hommes et femmes d’âges et d’horizons différents ont répondu à l’appel de Mensch Collective pour réfléchir ensemble au rôle de la parité dans le futur du travail souhaitable.

 Ce texte reprend les principaux constats établis et les propositions formulées par les participants à l’issue de ce temps d’échanges.

La complexité du monde devient telle qu’il faut commencer à penser la société avec toute l’humanité, pas seulement avec sa moitié

Nous sommes le produit d’une histoire vieille de dix mille ans où le masculin s’est rapidement imposé comme force vive et acteur principal de nos sociétés et, jusqu’à il y a peu, cet ensemble de croyances et pratiques sociales était considéré comme allant de soi et semblait adapté au monde.

Cependant, le monde dans lequel nous évoluons est en train de laisser place à un nouveau monde, mouvant et encore incertain. L’enjeu de redéfinir la société est de taille et pour y parvenir réellement, nous avons besoin de la penser avec l’humanité dans son ensemble et plus seulement sa moitié.

Il nous faut penser et agir de manière inclusive, féminine et masculine, en réunissant ces polarités pour générer un futur souhaitable.

 « Nous comprenons qu’il faut désormais abandonner les traditionnelles oppositions entre hommes et femmes et concentrer les attentions sur les nouvelles relations complémentaires. »

 Aujourd’hui, la parité est surtout adressée quantitativement, mais il est important de voir au-delà des chiffres et de réfléchir à une parité de qualité entre les hommes et les femmes, qui puisse être englobante et favorable au bien commun. Il s’agit là d’une chance de sortir d’un modèle stéréotypé, et de créer un nouvel équilibre, voire une nouvelle humanité.

Du pouvoir sur…  au pouvoir de

 L’évolution de l’organisation du travail est toujours liée à l’évolution de la société. Alors que nous étions dans des organisations mécaniques, nous évoluons à présent vers des organisations vivantes, avec une raison d’être au centre et des relations d’interdépendance entre chacun. Dans ce monde du travail émergeant, où nous passons de la séparation à la réunion, le leadership devra allier à la fois vulnérabilité et puissance, car nous passons du « pouvoir sur » (les autres), au « pouvoir de » (universel)

Inspirations pour leadership de demain : alliance d’un général d’armée et d’une sage-femme

 Durant leurs échanges, les participants ont souligné qu’il y avait un plafond de verre imposé par les hommes, et celui que les femmes s’imposent elles-mêmes. Elles doivent donc oser s’affirmer et prendre leur place. Et que manque-t-il vraiment pour faciliter cette démarche ? Des modèles de femmes dans la sphère professionnelle. Il y a encore trop peu de femmes leaders, inspirantes, qui prennent la parole en public. Et, lorsque l’entreprise fait appel à des speakers externes pour intervenir auprès de ses collaborateurs, elle aura plutôt tendance à solliciter un Général d’armée (symbole ultime du leadership au masculin, qui incarne la puissance, la conquête, la prise de risque) qu’une sage-femme (symbole ultime du leadership féminin, qui incarne la présence, l’accompagnement, la vie). Un premier pas vers un leadership inclusif serait peut-être d’inviter comme inspirateurs sur le thème du leadership des généraux et des sages-femmes !

Entre peur de l’inconnu et perte de certains acquis

Face à la parité, une peur émerge du côté des hommes comme des femmes, celle de la perte de place, l’abandon de rôles inconsciemment acquis et très peu remis en question mais qui sont désormais à déconstruire pour sortir des stéréotypes et des schémas transgénérationnels. Nous faisons face à une peur de l’inconnu.

Les hommes appréhendent le lâcher-prise, car aujourd’hui, ce ne serait plus tant aux femmes de s'adapter au modèle professionnel dominant conçu par les hommes et en grande partie pour les hommes, mais aux hommes de s'ajuster à de nouvelles façons d’appréhender le travail.

 De leur côté, les femmes ne cherchent pas forcément toujours la parité.  Si elles prennent plus de place dans la vie publique, elles pourraient perdre leur place dans la sphère privée et familiale mais aussi elles devront prendre plus de risques, de responsabilités et se mettre en danger.

Enfin, les participants ont soulevé un risque d’hyper individualisme :

« Si tout le monde devient un individu à part entière, qui n’a besoin que de soi-même, qu’allons-nous encore partager entre individus ? »

Et demain ?

À la fin de la matinée, les participants ont émis quelques recommandations pour plus de parité au service du monde émergeant :

1. Éducation et connaissance de soi

Le sujet de l’éducation est primordial pour donner un cadre et permettre aux nouvelles générations d’apprendre par eux-mêmes, d’être curieux et de mieux se connaître soi-même, d’incarner leur masculin et leur féminin tout en se construisant au-delà d’un genre socialement défini. L’important reste de ne pas s’uniformiser en valorisant la richesse du mélange et de la diversité. En définitive, la parité appelle une capacité au développement personnel de chacun, plus de respect, de liberté, et de responsabilités partagées.

2. Aux femmes de prendre leur place

« Les femmes ne peuvent plus laisser les hommes seuls pour penser et construire le monde social ! »

Elles doivent trouver la force et le courage de se lever, d’aller dans la lumière, de prendre le risque de se montrer et de se tromper. Elles doivent aussi lâcher prise dans la sphère privée et laisser une place plus importante aux hommes.

3. Accueillir les hommes

À l'heure actuelle, en cherchant à faire évoluer les mentalités et à repenser les rôles sociaux de genre, il est nécessaire de veiller au maintien des acquis de nos mères tout en ajoutant à la démarche de l’empathie et de l’inclusion. Les hommes doivent se sentir accueillis, écoutés sur la question de la parité. Car sans une aide et co-construction commune, nous ne serons pas en mesure de créer notre futur souhaitable. Ce qui doit importer désormais, c’est notre but commun. Et pour cela nous avons besoin de toute l’humanité.

4. Accepter la phase de deuil de l’ancien modèle

Au-delà de l’ambivalence que provoque l’inquiétude mêlée à l’excitation, il y a un deuil de l’ancien et une réjouissance du nouveau.

« Il faut accepter cette phase de deuil, l’incertitude et la vulnérabilité qui en résultent, et accueillir ce qui viendra en veillant à maintenir la diversité et l’équilibre entre culture collective et culture de soi. »

Un grand merci à tous les participants de cette matinée pour la richesse et la qualité des échanges !